jeudi 23 décembre 2010

a) Médias et publicité : l’accès à la liberté


La télévision en Allemagne de l’Est (Deutscher Fernsehfunk) 



« Deutscher Fernsehfunk » était l’entreprise de télédiffusion publique de la République démocratique allemande. Fondée en 1952, elle était contrôlée directement par le gouvernement de la RDA ainsi que par le Comité Central du Parti socialiste unifié d’Allemagne (SED). La Deutscher Fernsehfunk comprenait deux chaînes de télévision différentes, DFF-1 et DFF-2, et constituait, avec le groupe de radiodiffusion est-allemande « Rundfunk der DDR » la radiotélévision de la République démocratique allemande. 
A la fin des années 40, le développement d’une chaîne de télévision n’est pas considéré comme une priorité par les autorités est-allemandes. Cependant, la radio de RFA « Nordwestdeutsche Rundfunk », mise en place par les Britanniques, commence à émettre sur de nouvelles fréquences et dispose donc d’une meilleure couverture à Berlin et en RDA. Ainsi, les autorités communistes décident d’utiliser la télévision comme moyen de propagande et de contrôle en Allemagne de l’Est, et le gouvernement fait construire  le premier studio  de télévision à Adlershof (quartier de Berlin-Est), qui est inauguré le 11 juin 1950.Quelques mois plus tard, le 20 décembre, la « Télévision de Berlin » commence à émettre, et deux ans plus tard, le 21 décembre 1952, elle débute ses programmes réguliers durant deux heures par jour, avec par exemple le journal télévisé « Aktuelle Kamera ».
La télévision de RDA compte une audience relativement limitée en 1952, la radio étant à cette époque le média dominant. Le contrôle du parti y est donc moindre et les journalistes disposent d’une certaine liberté. Cependant, avec les soulèvements des 16 et 17 juin 1953, où le gouvernement renvoie le directeur de la chaîne et plusieurs présentateurs, la situation change radicalement. A partir de cet évènement, le contrôle du Parti socialiste unifié d’Allemagne sur la télévision et la radio devient total, et les émissions et informations diffusées à l’antenne doivent préalablement avoir été validées par le gouvernement.
La couverture de la télévision est-allemande augmente progressivement à la fin des années 50, parallèlement à la télévision ouest-allemande qui installe ses émetteurs à proximité de la frontière afin de permettre aux citoyens de RDA d’avoir accès à ses programmes. Au début des années 1960, la DFF s’impose comme média de masse, et l’on dénombre près d’un million de postes de télévision dans le pays.
Cependant, toutes le émissions proposées  par la DFF ne bénéficient pas de la même popularité, certains programmes de divertissement (comme Sandmännchen) étant beaucoup plus suivis que le journal télévisé de RDA, Aktuelle Kamera, qui souffre de la concurrence de son homologue à l’ouest diffusé à la même heure (20 heures). La DFF décale donc l’horaire de diffusion d’Aktuelle Kamera à 19 heures 30, et met en place un programme de propagande, Der schwarze Kanal, afin de contrer les émissions proposées par les médias de RFA.
Le 3 octobre 1969, la télévision est-allemande lance une seconde chaîne de télévision baptisée DFF-2. A cette occasion, le gouvernement d’Allemagne de l’Est inaugure avec fierté l’un des monuments emblématiques de Berlin-Est, la Fernsehturm (Tour de télévision), haute de 368 mètres. La DFF-2 opte pour le système SECAM, contrairement aux chaînes de RFA qui utilisent le système PAL.  Au mois de février 1972, Deutscher Fernsehfunk est officiellement rebaptisée Fernsehen der DDR (Télévision de la RDA, abrégée en F-DDR).
Les chaînes de la DFF diffusent des pages de publicité dans un format différent de celui des pays occidentaux. Cependant, dans les pays socialistes comme la RDA, il n’existe généralement qu’une seule marque correspondant à un produit donné , ainsi les « publicités » est-allemandes ne constituent pas réellement de la réclame, mais plutôt des communiqués gouvernementaux annonçant la mise à disposition d’un produit donné (par exemple, d’un nouveau modèle de Trabant).

 Avec l’arrivée au pouvoir d’Erich Honecker, la télévision  est-allemande accroît considérablement son offre d’émissions de divertissement et de productions cinématographies, même si le contrôle gouvernemental sur l’information reste total. Cette politique de modernisation se poursuit dans les années 1980. Afin de tenter de rallier la jeunesse, qui est de plus en plus attirée par les médias de RFA, le gouvernement lance un programme spécifique destiné aux jeunes, Elf 99. Le contrôle exercé par le gouvernement sur les informations devient moins pesant, les journalistes d’Aktuelle Kamera n’hésitent plus à diffuser des personnes critiquant le gouvernement, et retransmette rapidement les images des premiers mouvements de masse qui secoue le pays au cours de l’année 1989. La chute d’Honecker au mois d’octobre 1989 accentue encore le phénomène, la télévision adoptant un ton de plus en plus libre et dépolitisé. L’émission de propagande Der schwarze Kanal s’arrête le 30 octobre.
Le 7 novembre, le premier secrétaire du parti et successeur de Honecker, Egon Krenz annonce en direct à la télévision la possibilité pour les citoyens est-allemands de quitter le pays, mesure prenant effet immédiatement. Quelques heures plus tard, la chute du Mur de Berlin est retransmise en direct par toutes les chaînes de télévisions du monde, y compris la télévision est-allemande, opérant pour la première fois de son histoire sans aucune censure. Après la réunification allemande, un accord prévoit la dissolution de la DFF à compter du 31 décembre 1990 et son remplacement par la télévision de RFA, ARD.



La radio en Allemagne de l’Est (Rundfunk der DDR)
Rundfunk der DDR était le nom de la compagnie de radiodiffusion nationale de la République Démocratique d’Allemagne. Elle fut fondée en 1952 et poursuivit ses émissions jusqu’en 1990. Le siège de la R-DDR était situé à Berlin-Est, sur la Funklaus Nalepastraβe, et des annexes étaient implantées dans les principales villes est-allemandes, comme Postdam, Leipzig, Weimar et Dresde.
La Rundfunk des DDR opérait de nombreuses stations de radio :
-          quatre stations de radio destinées à la RDA : DDR-1, DDR-2, Berliner Rundfunk et DT64
-          une station de radio théoriquement destinée a toute l’Allemagne : Deutschlandsender
-          trois stations internationales : Radio Berlin International, Berliner Welle et Stimme des DDR (« la voix de la RDA »)
A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, Berlin est séparé en quatre zones d’occupation. Le 13 mai 1945, l’administration militaire soviétique organise la création d’une nouvelle station de radio pour les habitants de Berlin. Parallèlement aux Soviétiques, les Britanniques et les Américains créent leur propre station de radio depuis des studios situés à Berlin-Ouest. La radio britannique porte le nom de Nordwestdeutscher Rundfunk, et celle des Américains est baptisée Rundfunk in Amerikanischen Sektor (RIAS). En 1948, la Nordwestdeutscher Rundfunk est placée sous le contrôle du gouvernement de RFA, tandis que la radio américaine continue d’opérer de manière indépendante.
En 1952, la radio soviétique est placée sous le contrôle du gouvernement est-allemand, qui, désireux de donner un siège à la radio nationale, ordonne l’édification d’un bâtiment imposant situé au bord de la Spree. Le siège de la Funkhaus Nalepastraβe est inauguré le 4 septembre 1954.
Suite à la construction du mur de Berlin, les médias est-allemands entament une propagande intensive qui vise à dissuader les citoyens de RDA d’écouter les programmes « subversifs » de l’ouest, et à justifier la situation à Berlin-Est par la « défense du socialisme ». Le mouvement des Jeunes de la RDA (Freie Deutsche Jugend) met en place une campagne intitulée « Blitz contra Natosender » (Combat contre les émetteurs de l’OTAN) afin d’encourage les Allemands de l’Est à ne plus écouter les émissions venues de l’ouest.




De part et d’autre de la frontière débute ainsi une véritable guerre des ondes entre les médias de RDA et de RFA, d’autant plus que de nombreux Allemands de l’Est  ont accès aux émissions de radio de la RFA et de la RIAS américaine car le territoire est-allemand est à la portée des émetteurs de l’ouest. En 1958 est créée la quatrième station de radio nationale, DDR-2. Elle est rejointe en 1986 par DT64, une radio destinée à la jeunesse.

La chute du Mur de Berlin consacre le début de l’effondrement de la RDA. En 1990, R-DDR entame un rapprochement avec les médias de RFA. La DDR-1 devient la Ostdeutscher Rundfunk Brandenburg, la DDR-2 Mitteldeutscher Rundfunk, tandis que DT64 prend le nom de MDR Sputnik. En 1994, la fusion de Deutschlandsender et de RIAS donne naissance à DeutschlanRadio Berlin, rebaptisée ultérieurement Deutschlandradio Kultur.