jeudi 30 décembre 2010

INTRODUCTION

Berlin au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale
 Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l'Allemagne se retrouve découpée en quatre zones d'occupation :
-une zone soviétique
-une zone britannique
- une zone américaine
- une zone française,
Conformément à l'accord conclu entre les Alliés vainqueurs en février 1945 à Yalta.





Berlin se retrouve également divisée en quatre, mais l'armée soviétique laisse aux Occidentaux l'ensemble de la zone Ouest de la capitale. 

Le secteur Est de la ville de Berlin représente 409 km2, soit 45,6% de la superficie de la ville. La capitale allemande devient très vite un enjeu majeur de la Guerre froide qui s'engage dès la fin des hostilités le 8 mai 1945.

·         Le 19 mars 1948, en suspendant sa participation au Conseil de contrôle allié et du commandement Interallié, l'Union soviétique rompt la coopération avec les forces alliées occupantes. Du 24 juin 1948 au 12 mai 1949, Staline instaure le blocus de Berlin, entravant tout transit entre l'Allemagne de l'Ouest et Berlin-Ouest, qui survivra grâce au pont aérien mis en place par les Etats-Unis.

·         En 1949 est créée la République Fédérale d'Allemagne (RFA), regroupant les zones américaines, britanniques et françaises. Peu de temps après, l'Union soviétique crée la République Démocratique d'Allemagne (RDA), formalisant la séparation de Berlin en deux entités distinctes, même si la ville reste officiellement une zone démilitarisée. Le 27 novembre 1958, le premier secrétaire du parti communiste soviétique Nikita Khrouchtchev, lance un ultimatum aux trois autres puissances occupantes dans lequel il réclame un nouveau statut pour la ville de Berlin.

1961 : la construction du Mur de Berlin
Dans la nuit du 12 au 13 août 1961, la pose de grillage et de barbelés tout autour de Berlin-Ouest marque le début du processus d'édification du Mur de Berlin, projet secret du gouvernement est-allemand. 14 500 membres des forces armées bloquent les rues et les voies ferrées menant à Berlin-Ouest. Des troupes soviétiques se tiennent prêtes au combat et se massent aux postes frontières des Alliés. Tous les moyens de transport entre les deux Berlin sont interrompus. Les pays membres du pacte de Varsovie publient, le même jour, une déclaration pour soutenir le bouclage de la frontière entre les deux Berlin.
Durant toute la nuit, sur ordre du Parti Communiste et sous surveillance policière, des maçons vont empiler les parpaings qui sépareront la capitale allemande pendant plus de 28 ans.
Le principal objectif des Soviétiques est de stopper le flot d'émigration croissant vers la RFA que subit la RDA depuis sa création en 1949.

En effet, de 1949 à 1961 entre 2,6 et 3,6 millions d'Allemands fuient la RDA pour se rendre à l'Ouest, privant de ce fait l'Allemagne de l'Est d'une main-d'œuvre importante. La majeure partie de ces migrants passe par Berlin, où les contrôles à la frontière sont beaucoup moins efficaces que dans les zones rurales.
Ainsi, jusqu’en août 1961, il suffit de prendre le métro ou le chemin de fer berlinois pour passer d'Est en Ouest, ce que font quotidiennement les Berlinois pour aller travailler. De plus, Berlin représente à l'époque une porte d'entrée vers l'Ouest facile d'accès pour les Tchèques ou les Polonais.
Avant même la construction du Mur, la police de la RDA surveille attentivement la frontière afin d'empêcher ceux que le régime nomme "les déserteurs de la République" de passer à l'Ouest.

La construction du Mur va être une réaction à l'effondrement économique de la RDA. En effet, comme tout pays communiste, cette dernière s'est vue imposer par Moscou une économie planifiée : le plan septennal (1959-1965) est un échec dès le début, la production industrielle augmentant moins vite que prévu et la collectivisation des terres agricoles entraînant une baisse de la production
et une pénurie alimentaire.

L’ancien poste frontière Friedrichstraße, appelé "Checkpoint Charlie", devient à partir de 1961 le point de passage pour les membres des forces alliées américaines, britanniques et françaises stationnées à Berlin et désirant se rendre à Berlin-Est. Ce poste frontière doit son appellation à l’alphabet radiophonique international (utilisé par l’OTAN). Les membres des forces alliées stationnées en Allemagne disposaient de trois points de passage pour rejoindre le centre de Berlin: le Checkpoint A (Alpha) à Helmstedt, qui était le point de passage de RFA en RDA, le Checkpoint B (Bravo) à Drewitz, qui était le poste de passage de RDA à Berlin-Ouest, et, enfin, le Checkpoint C (Charlie), le poste frontière pour le transit de Berlin-Ouest à Berlin-Est.


La déclaration du sommet des membres Pacte de Varsovie, suite à la rencontre Walter Ulbricht, président du Conseil d'Etat de la RDA, et Nikita Khrouchtchev en 1961 propose ainsi de " contrecarrer à la frontière avec Berlin-Ouest les agissements nuisibles aux pays du camp socialiste et d'assurer autour de Berlin-Ouest une surveillance fiable et un contrôle efficace".Le dimanche 13 août, des barbelés et des barrières provisoires sont déployés à la frontière berlinoise entre les secteurs d’occupation Est et Ouest. Les jours suivants, les barbelés sont remplacés par un mur en pierres de taille importante, sous l’étroite surveillance des gardes-frontières de RDA. Les portes et fenêtres des façades d’immeubles sont murées et intégrées dans le dispositif de séparation des deux moitiés de la ville.
Le jour même Konrad Adenauer, chancelier de la RFA, appelle la population à rester calme. Pour autant, la réaction des Alliés n'est pas immédiate et seul le maire de Berlin, Willy Brandt, proteste énergiquement. La première manifestation devant le Mur a lieu le 16 août et réunit 300 000 personnes autour du maire.

Les réactions à l'Ouest, qui se font attendre, apparaissent ambigües. Les Alliés français et anglais considèrent que la construction du mur est le fait de l'URSS. Du côté des Etats-Unis, alors que le secrétaire d'État américain Dean Rusk condamne fermement la restriction de liberté de circulation des Berlinois, le président John Fitzgerald Kennedy, s'il assure à la ville de Berlin tout son soutien, considère cependant que l'option prise par la RDA est "préférable à une guerre".

La première vraie confrontation entre Américains et Soviétiques n'aura lieu que le 27 octobre de la même année, au Checkpoint Charlie, point de contrôle américain entre Berlin-Ouest et Berlin-Est : des gardes-frontières de RDA exigent de contrôler des membres des forces alliées occidentales voulant se rendre en secteur soviétique, ignorant le droit de libre-circulation dans l’ensemble de la ville des forces d’occupation. Pendant trois jours, dix chars américains et dix soviétiques se postent de part et d'autre du mur. L'affaire se finit par un retrait des chars, aucune des deux parties ne voulant enclencher une escalade qui risquerait de se terminer en guerre nucléaire.


 1961-1989 : la vie de chaque côté du mur

Le 26 juin 1963, lors d'un voyage en Europe, John Fitzgerald prononce à Berlin-Ouest un de ses plus célèbres discours, dans lequel il déclare "Ich bin ein Berliner" ("je suis un Berlinois").
 Le président américain entend par cette phrase assurer le soutien des Etats-Unis aux Allemands de l’Ouest et notamment aux Berlinois.
La construction du Mur de Berlin va changer pour plusieurs années le visage de la capitale allemande. Et la circulation entre Berlin-Ouest et Berlin-Est va devenir peu à peu tout à fait impossible.
Dès le 13 août 1961, 69 des 81 points de passage existants sont fermés. Le 14 août, c'est la porte de Brandebourg qui est à son tour fermée, suivie de 14 autres points de passage.

Le mur intra-urbain, qui sépare Berlin-Ouest de Berlin-Est a atteint au final une longueur totale de 43,1 kilomètres. La partie du dispositif qui séparait Berlin-Est de Berlin-Ouest comprenait 111,9 kilomètres.
Au delà des répercutions politiques de la construction du mur, qui devient dès 1961 le symbole de la Guerre froide dans le monde entier, c'est la vie de toute une population qui va être bouleversée : 63 000 Berlinois de l'Est perdent leur emploi à l'Ouest, 10 000 de l'Ouest perdent leur emploi à Berlin-Est, et ce sont également des milliers de familles qui sont séparées pendant plus de vingt ans.
Les "deux Allemagnes" (RDA et RFA), à l'image des deux parties de la capitale, vont connaître une évolution bien différente. Ainsi alors que Berlin-Ouest se modernise avec la construction de bâtiments prestigieux autour de l'Alexanderplatz et de la Marx-Engels-Platz, Berlin-Est perd peu à peu de son animation. Sur le plan architectural, culturel, culinaire etc., un gouffre se creuse entre l'Est et l'Ouest.
La population allemande, et notamment berlinoise, souffre beaucoup de la séparation familiale que représente le Mur. Ainsi, ils seront nombreux à tenter de le traverser, et souvent à leurs risques et périls.
Ainsi, selon les recherches de la collectivité berlinoise de travailleurs "Collectif du 13 août",  1 135 personnes sont mortes en essayant de passer illégalement le Mur, même si le nombre exact de victimes est difficile à évaluer du fait du silence de la RDA sur ce sujet.
Chris Gueffroy est enfin la dernière victime du Mur, le 5 février 1989.
75 000 hommes et femmes furent condamnés à jusqu'à deux ans de prison en tant que "déserteurs de la république". La peine dépassait en général cinq ans si le fugitif dégradait les installations frontalières, était armé, soldat ou détenteur de secrets.

Un premier accord sur le règlement des visites de Berlinois de l'Ouest chez leurs parents de l'Est de la ville est signé le 17 décembre 1963. Il permet, du 19 décembre 1963 au 5 janvier 1964, à 1,2 million de Berlinois de rendre visite à leurs parents.
D’autres arrangements suivent en 1964, 1965 et 1966. Après l'accord quadripartite de 1971, le nombre des points de passage entre l'Est et l'Ouest est porté à dix.
Au début des années 1970, l'Ostpolitik, politique de rapprochement entre la RDA et la RFA menée par Willy Brandt et Erich Honecker rend la frontière entre les deux pays plus perméable. La RDA simplifie notamment les autorisations de voyage, en particulier pour les retraités, et autorise les visites de courte durée d'Allemands de l'Ouest dans les régions frontalières.
                                                              









 9 novembre 1989 : le Mur tombe

L'année 1989 marque un tournant à l'Est, dans les états satellites de l'URSS. En effet, alors que les soviétiques se retirent d'Afghanistan sans victoire, la Hongrie ouvre son Rideau de fer et la Pologne, en nommant à sa tête Tadeusz Mazowiecki, membre du syndicat Solidarnosc, s'achemine vers la démocratie.

Ce mouvement semble cependant ne pas atteindre l'Allemagne divisée. Durant l'été 1989, sous le prétexte de partir en vacances en Hongrie, 25 000 Allemands de l'Est rejoignent la RFA en profitant des frontières ouvertes en Hongrie et en Tchécoslovaquie.

En RDA, l'opposition au régime prend de l'ampleur, notamment à travers de nombreuses manifestations comme le 2 octobre à Leipzig, où 20 000 personnes descendent dans la rue.

Le 7 octobre, de passage à Berlin-Est pour le quarantième anniversaire de la création de la RDA, le président de l'Union soviétique Mikhaïl Gorbatchev indique aux dirigeants de la RDA que le recours à la répression armée est exclue.

Or, il semble que ce qui a précipité la chute du Mur soit une erreur, une déclaration prématurée d'un membre du SED (Sozialistische Einheitspartei Deutschlands), parti politique de la RDA. En effet, le 9 novembre Günter Schabowski accorde une conférence de presse retransmise en direct par la télévision du centre de presse de Berlin-Est, à une heure de grande écoute.

Lors de cette conférence, il déclare : "Les voyages privés vers l'étranger peuvent être autorisés sans présentation de justificatifs — motif du voyage ou lien de famille. Les autorisations seront délivrées sans retard. Une circulaire en ce sens va être bientôt diffusée. Les départements de la police populaire responsables des visas et de l'enregistrement du domicile sont mandatés pour accorder sans délai des autorisations permanentes de voyage, sans que les conditions actuellement en vigueur n'aient à être remplies. Les voyages y compris à durée permanente peuvent se faire à tout poste frontière avec la RFA."
Cette disposition est extraite d'un projet de décision du conseil des ministres qui n'a pas encore été approuvé et qui ne devait être communiqué que le lendemain. Diffusée dans de nombreux médias allemands, la nouvelle amène plusieurs milliers de Berlinois à se presser au postes-frontières situés le long du mur.

C'est ainsi que, sans ordre concret des autorités et sous la pression de la foule, le point de passage de la Bornholmer Straße est ouvert peu après 23h, suivi d'autres points de passage tant à Berlin qu'à la frontière avec la RFA, marquant la chute du Mur de Berlin, dans la nuit du jeudi 9 au vendredi 10 novembre 1989. Cet événement reste marqué dans l'histoire allemande sous le nom de "die Wende" (le tournant).

Dès le 9 novembre, les Berlinois entament la destruction du Mur. Présent à Berlin, le violoncelliste virtuose Mstislav Rostropovitch, qui avait dû s'exiler à l'Ouest pour ses prises de position en URSS, vient encourager les démolisseurs en jouant du violoncelle au pied du Mur. La photographie de cet événement deviendra célèbre et sera l'un des symboles de la chute du bloc communiste en Europe.


L'événement fait la Une de la presse internationale et les réactions se multiplient. Face au gouffre économique qui sépare les deux Allemagnes, Helmut Kohl, Chancelier de la RFA, annonce dès le 28 novembre 1989 un plan en dix points visant la réunification. Ainsi, le 12 septembre 1990, moins d'un an après la chute du Mur de Berlin est signé le Traité de Moscou qui rend sa pleine souveraineté à l’Allemagne, et le 3 octobre de la même année, les deux Allemagnes (RFA et RDA) sont officiellement réunifiées.

Mais les conséquences de la chute du Mur dépassent largement les frontières allemandes. Elle entraîne en effet le démantèlement de l’empire soviétique. Ainsi, à Prague, la Révolution de Velours (17-18 novembre 1989) met fin au communisme. En Bulgarie, le stalinien Todor Jivkov doit accepter son remplacement par un communiste plus ouvert, Petar Mladenov. En Roumanie, Ceausescu est éliminé plus violemment en 1989. En Union soviétique, les États baltes proclament leur indépendance en mars et mai 1990.

mercredi 29 décembre 2010

Une reconstitution 3D du mur de Berlin


Problématique et plan:

Ici, la question est :
« La chute du Mur de Berlin a-t-elle eue de réelles conséquences socio-culturelles ? »
nous y répondrons par :

I.                   Un territoire, deux histoires : la rencontre des peuples allemands.
II.                 Au-delà de l’euphorie de la chute du Mur, la perspective d’un réel essor culturel.
       c)      Les jeunes s’ouvrent sur le monde
III.              "Ostalgie", influences et commémorations de la chute du Mur.

lundi 27 décembre 2010

a) D’un point de vue politique

Le processus d’unification de l’Allemagne commence dès novembre 1989 lors de la chute du mur de Berlin et dure jusqu’au 3 octobre 1990, date de la réunification officielle des deux Allemagnes. La loi votée par le parlement de la RDA le 23 août 1990 conduit à l’intégration de la République Démocratique Allemande dans la République Fédérale d’Allemagne, et plus précisément donc de l‘adoption de la loi fondamentale de la RFA (qui est la Constitution ouest-allemande depuis le 23 mai 1949) par la RDA. Le nouveau Préambule de la Loi fondamentale, issu du traité d’union du 31 août 1990, rappelle que l’unité a été décidée par les Allemands dans Länder énumérés et que la Loi fondamentale vaut pour l’ensemble du peuple allemand. Conformément à la situation d’avant la réunification, le Tribunal Constitutionnel Fédéral (TCF) est le gardien de la constitution.
                 


                Parlant du cas de la RDA, Stéphane Schott (Université Lyon-2) décrit « la constitutionnalisation de l’est comme adhésion au constitutionnalisme ». Cela montre décidément l’immense influence et la supériorité totale de la RFA dans ce processus de réunification, dans le sens où elle a en quelque sorte absorbé brutalement le territoire est-allemand et tout ce qui allait avec. Ainsi, l’Etat est-allemand a disparu en s’intégrant aux structures préexistantes de l’Etat ouest-allemand.
 
                La RDA et le communisme soviétique disparaissant peu à peu, tout - politiquement, constitutionnellement, socialement, économiquement, etc. - adhère au système occidental puisque l’Allemagne de l’Est n’existe plus. Les cinq nouveaux États fédérés (Bundesländer) correspondant à l’ancienne République Démocratique Allemande (Mecklembourg, Brandebourg, Saxe-Anhalt, Saxe et Thuringe) s’unissent aux onze anciens Bundesländer (Bade-Wurtemberg, Bavière, Berlin, Brème, Hambourg, Hesse, Basse-Saxe, Rhénanie du Nord-Westphalie, Rhénanie-Palatinat, Sarre et Schleswig-Holstein). Cependant, il a fallu attendre juin 1991 pour que le Bundestag (l’Assemblée législative) décide que Berlin serait le futur siège du gouvernement et du Parlement, à la place de Bonn.







Le président fédéral (Bundespräsident) est le chef de l’État de la République fédérale d’Allemagne (conformément à la Loi fondamentale de 1949). Il a essentiellement un rôle honorifique et de représentation, le pouvoir exécutif étant exercé par le chancelier fédéral. De manière évidente, depuis 1990, les présidents fédéraux appartiennent au même parti politique que leur chancelier.
          
  Le chancelier fédéral (Bundeskanzler) est le chef de gouvernement de la République fédérale d’Allemagne (conformément à la Loi fondamentale de 1949). Elu par le Bundestag, il est le chef du gouvernement fédéral et est le point central du pouvoir exécutif. Il dispose de pouvoirs assez étendus au sein du système politique, à tel point qu’on a pu parler d’une « démocratie du chancelier » (Kanzlerdemokratie).
Les partis traditionnels de l'ancienne RFA étaient au nombre de quatre : l'Union démocrate-chrétienne (la CDU) alliée à l'Union chrétienne sociale (la CSU), qui n'est représentée qu'en Bavière, le parti libéral (le FDP) et le parti social démocrate (le SPD). En 1983, le parti écologiste, les Verts (Die Grünen), a fait son entrée au Bundestag. Quant à la RDA, avant 1990, le seul parti vraiment puissant au Parlement était le SED (Sozialistische Einheitspartei Deutschlands, ou Parti socialiste unifié d’Allemagne), c’est-à-dire le parti communiste Est-allemand. D’autres formations indépendantes existaient mais elles étaient politiquement largement inférieures au Parti communiste. Aujourd’hui, il convient d'ajouter le parti du socialisme démocratique, le PDS (héritier du SED), ainsi qu'une alliance entre l’"Alliance 90" (Bündnis 90) et les Verts. D’une manière générale, aujourd’hui, ce sont les partis de l’Ouest qui ont le plus d’influence au Bundestag, étant donné l’existence d’un parti quasi unique en RDA.



Comme prévu par la loi du 23 août 1990, toutes les institutions est-allemandes, qu’elles soient politiques, juridiques, culturelles, militaires, sportives, etc., disparaissent. Pour le peuple est-allemand, il s’agit donc d’un long processus d’apprentissage de la démocratie.


dimanche 26 décembre 2010

b) D'un point de vue sociétal

            Selon l’historien et philosophe Tilo Schabert, le principal bénéfice de la réunification est que les Allemands « se sentent beaucoup mieux dans leur peau ». Celui-ci ajoute que « la fin du totalitarisme et la réunification, somme toute réussie, leur permettent de renouer avec leur identité historique ».En 2006, pour la première fois depuis dix-sept ans, les Allemands ont communié dans la ferveur et la bonne humeur autour de leur équipe nationale lorsqu’ils organisent la coupe du monde de football. 80 % des 14-19 ans se sentent Allemand et non plus Allemand de l’Ouest ou Allemand de l’Est. Par ailleurs, la fin de la guerre froide a mis fin à un profond sentiment d’impuissance présent des deux côtés du mur. La chute du mur a libéré les Allemands d’un traumatisme permanent. En effet, les Allemands savaient qu’ils auraient été les victimes d’une guerre atomique. C’est grâce à la réunification que cette peur permanente a disparu. Le niveau de vie a augmenté de 80% en quelques années, depuis la chute du mur.



           La réunion des deux Allemagne a achevé l’ancrage complet du pays dans un modèle occidental du parlementarisme, de la démocratie représentative et des droits de l’homme, fondements de la construction européenne.

samedi 25 décembre 2010

c) Les difficultés de cette rencontre

  Malgré la joie du peuple allemand lors de cette réunification, les tensions existantes entre Est-Allemands et Ouest-Allemands se sont quelque peu accentuées lors de cette union: la RFA, sous l'autorité d'un système libéral et capitaliste, a considérablement pu se développer durant les "30 glorieuses" au niveau économique et industrielle tandis que la RDA, sous l'emprise du régime totalitaire communiste, qui a littéralement anéanti toutes formes de libre échange et de concurrence,  n'a pu se développer correctement dans ces domaines. Au lendemain du 9 Novembre 1989, l'Allemagne de l'est est à bâtir, et ce sont les habitants de RFA, cette partie riche et prospère de l'Allemagne, qui en font les frais. D'un côté, les allemands de l'ouest considèrent leurs compatriotes de l'est comme une source de contraintes financières en même temps que ces derniers, cultivent une certaine forme de rancœur envers leurs homologues de l'ouest, qui ne souciaient pas beaucoup de leur situation au temps de la séparation.
Le bonheur provoqué par cette rencontre, présente donc certaines limites sur le plan sociétal et humain.

jeudi 23 décembre 2010

a) Médias et publicité : l’accès à la liberté


La télévision en Allemagne de l’Est (Deutscher Fernsehfunk) 



« Deutscher Fernsehfunk » était l’entreprise de télédiffusion publique de la République démocratique allemande. Fondée en 1952, elle était contrôlée directement par le gouvernement de la RDA ainsi que par le Comité Central du Parti socialiste unifié d’Allemagne (SED). La Deutscher Fernsehfunk comprenait deux chaînes de télévision différentes, DFF-1 et DFF-2, et constituait, avec le groupe de radiodiffusion est-allemande « Rundfunk der DDR » la radiotélévision de la République démocratique allemande. 
A la fin des années 40, le développement d’une chaîne de télévision n’est pas considéré comme une priorité par les autorités est-allemandes. Cependant, la radio de RFA « Nordwestdeutsche Rundfunk », mise en place par les Britanniques, commence à émettre sur de nouvelles fréquences et dispose donc d’une meilleure couverture à Berlin et en RDA. Ainsi, les autorités communistes décident d’utiliser la télévision comme moyen de propagande et de contrôle en Allemagne de l’Est, et le gouvernement fait construire  le premier studio  de télévision à Adlershof (quartier de Berlin-Est), qui est inauguré le 11 juin 1950.Quelques mois plus tard, le 20 décembre, la « Télévision de Berlin » commence à émettre, et deux ans plus tard, le 21 décembre 1952, elle débute ses programmes réguliers durant deux heures par jour, avec par exemple le journal télévisé « Aktuelle Kamera ».
La télévision de RDA compte une audience relativement limitée en 1952, la radio étant à cette époque le média dominant. Le contrôle du parti y est donc moindre et les journalistes disposent d’une certaine liberté. Cependant, avec les soulèvements des 16 et 17 juin 1953, où le gouvernement renvoie le directeur de la chaîne et plusieurs présentateurs, la situation change radicalement. A partir de cet évènement, le contrôle du Parti socialiste unifié d’Allemagne sur la télévision et la radio devient total, et les émissions et informations diffusées à l’antenne doivent préalablement avoir été validées par le gouvernement.
La couverture de la télévision est-allemande augmente progressivement à la fin des années 50, parallèlement à la télévision ouest-allemande qui installe ses émetteurs à proximité de la frontière afin de permettre aux citoyens de RDA d’avoir accès à ses programmes. Au début des années 1960, la DFF s’impose comme média de masse, et l’on dénombre près d’un million de postes de télévision dans le pays.
Cependant, toutes le émissions proposées  par la DFF ne bénéficient pas de la même popularité, certains programmes de divertissement (comme Sandmännchen) étant beaucoup plus suivis que le journal télévisé de RDA, Aktuelle Kamera, qui souffre de la concurrence de son homologue à l’ouest diffusé à la même heure (20 heures). La DFF décale donc l’horaire de diffusion d’Aktuelle Kamera à 19 heures 30, et met en place un programme de propagande, Der schwarze Kanal, afin de contrer les émissions proposées par les médias de RFA.
Le 3 octobre 1969, la télévision est-allemande lance une seconde chaîne de télévision baptisée DFF-2. A cette occasion, le gouvernement d’Allemagne de l’Est inaugure avec fierté l’un des monuments emblématiques de Berlin-Est, la Fernsehturm (Tour de télévision), haute de 368 mètres. La DFF-2 opte pour le système SECAM, contrairement aux chaînes de RFA qui utilisent le système PAL.  Au mois de février 1972, Deutscher Fernsehfunk est officiellement rebaptisée Fernsehen der DDR (Télévision de la RDA, abrégée en F-DDR).
Les chaînes de la DFF diffusent des pages de publicité dans un format différent de celui des pays occidentaux. Cependant, dans les pays socialistes comme la RDA, il n’existe généralement qu’une seule marque correspondant à un produit donné , ainsi les « publicités » est-allemandes ne constituent pas réellement de la réclame, mais plutôt des communiqués gouvernementaux annonçant la mise à disposition d’un produit donné (par exemple, d’un nouveau modèle de Trabant).

 Avec l’arrivée au pouvoir d’Erich Honecker, la télévision  est-allemande accroît considérablement son offre d’émissions de divertissement et de productions cinématographies, même si le contrôle gouvernemental sur l’information reste total. Cette politique de modernisation se poursuit dans les années 1980. Afin de tenter de rallier la jeunesse, qui est de plus en plus attirée par les médias de RFA, le gouvernement lance un programme spécifique destiné aux jeunes, Elf 99. Le contrôle exercé par le gouvernement sur les informations devient moins pesant, les journalistes d’Aktuelle Kamera n’hésitent plus à diffuser des personnes critiquant le gouvernement, et retransmette rapidement les images des premiers mouvements de masse qui secoue le pays au cours de l’année 1989. La chute d’Honecker au mois d’octobre 1989 accentue encore le phénomène, la télévision adoptant un ton de plus en plus libre et dépolitisé. L’émission de propagande Der schwarze Kanal s’arrête le 30 octobre.
Le 7 novembre, le premier secrétaire du parti et successeur de Honecker, Egon Krenz annonce en direct à la télévision la possibilité pour les citoyens est-allemands de quitter le pays, mesure prenant effet immédiatement. Quelques heures plus tard, la chute du Mur de Berlin est retransmise en direct par toutes les chaînes de télévisions du monde, y compris la télévision est-allemande, opérant pour la première fois de son histoire sans aucune censure. Après la réunification allemande, un accord prévoit la dissolution de la DFF à compter du 31 décembre 1990 et son remplacement par la télévision de RFA, ARD.



La radio en Allemagne de l’Est (Rundfunk der DDR)
Rundfunk der DDR était le nom de la compagnie de radiodiffusion nationale de la République Démocratique d’Allemagne. Elle fut fondée en 1952 et poursuivit ses émissions jusqu’en 1990. Le siège de la R-DDR était situé à Berlin-Est, sur la Funklaus Nalepastraβe, et des annexes étaient implantées dans les principales villes est-allemandes, comme Postdam, Leipzig, Weimar et Dresde.
La Rundfunk des DDR opérait de nombreuses stations de radio :
-          quatre stations de radio destinées à la RDA : DDR-1, DDR-2, Berliner Rundfunk et DT64
-          une station de radio théoriquement destinée a toute l’Allemagne : Deutschlandsender
-          trois stations internationales : Radio Berlin International, Berliner Welle et Stimme des DDR (« la voix de la RDA »)
A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, Berlin est séparé en quatre zones d’occupation. Le 13 mai 1945, l’administration militaire soviétique organise la création d’une nouvelle station de radio pour les habitants de Berlin. Parallèlement aux Soviétiques, les Britanniques et les Américains créent leur propre station de radio depuis des studios situés à Berlin-Ouest. La radio britannique porte le nom de Nordwestdeutscher Rundfunk, et celle des Américains est baptisée Rundfunk in Amerikanischen Sektor (RIAS). En 1948, la Nordwestdeutscher Rundfunk est placée sous le contrôle du gouvernement de RFA, tandis que la radio américaine continue d’opérer de manière indépendante.
En 1952, la radio soviétique est placée sous le contrôle du gouvernement est-allemand, qui, désireux de donner un siège à la radio nationale, ordonne l’édification d’un bâtiment imposant situé au bord de la Spree. Le siège de la Funkhaus Nalepastraβe est inauguré le 4 septembre 1954.
Suite à la construction du mur de Berlin, les médias est-allemands entament une propagande intensive qui vise à dissuader les citoyens de RDA d’écouter les programmes « subversifs » de l’ouest, et à justifier la situation à Berlin-Est par la « défense du socialisme ». Le mouvement des Jeunes de la RDA (Freie Deutsche Jugend) met en place une campagne intitulée « Blitz contra Natosender » (Combat contre les émetteurs de l’OTAN) afin d’encourage les Allemands de l’Est à ne plus écouter les émissions venues de l’ouest.




De part et d’autre de la frontière débute ainsi une véritable guerre des ondes entre les médias de RDA et de RFA, d’autant plus que de nombreux Allemands de l’Est  ont accès aux émissions de radio de la RFA et de la RIAS américaine car le territoire est-allemand est à la portée des émetteurs de l’ouest. En 1958 est créée la quatrième station de radio nationale, DDR-2. Elle est rejointe en 1986 par DT64, une radio destinée à la jeunesse.

La chute du Mur de Berlin consacre le début de l’effondrement de la RDA. En 1990, R-DDR entame un rapprochement avec les médias de RFA. La DDR-1 devient la Ostdeutscher Rundfunk Brandenburg, la DDR-2 Mitteldeutscher Rundfunk, tandis que DT64 prend le nom de MDR Sputnik. En 1994, la fusion de Deutschlandsender et de RIAS donne naissance à DeutschlanRadio Berlin, rebaptisée ultérieurement Deutschlandradio Kultur.

mercredi 22 décembre 2010

b) La culture allemande se libéralise et s’exporte


           A la chute du mur, le génie berlinois peut enfin s’exprimer. D’un point de vue artistique, la réunification a permis aux artistes de produire et de vendre librement.
Le Tacheles, situé a l’angle de Friedrichstr. et de Oranienburger str. et anciennement utilisé comme salle de spectacle et de refuge pour les soldats, devient, lors de la séparation des deux Allemagnes, le repère de nombreux artistes allemands. Aujourd’hui encore, 20 ans après la réunification des deux états, il s’agit toujours d’un lieu de rencontre et de création pour les artistes du monde entier ce qui traduit une certaine libéralisation et une importante mondialisation dans l’art allemand.

           Les berlinois, ayant le sens pratique, ont réutilisé la station de S-ban de Friedrichstr, autrefois utilisée comme point de passage entre l’est et l’ouest, afin d’en faire une salle de spectacle. Les allemands de l’est ont donc une réelle volonté de montrer leurs acquis et leur savoir-faire malgré leur difficile insertion dans le capitalisme.

           A Berlin, la mode architecturale est au cube contemporain alors qu’elle était aux immeubles gris et tristes sous le régime communiste en RDA. En moins de vingt ans, Berlin a été métamorphosée au niveau de ses constructions : construction d’un centre d’affaires démesuré, tout en verre, traversé d’arcades, où les gens aiment flâner dans les restaurants au bord des lacs artificiels. A travers l’architecture, on perçoit la victoire du capitalisme sur le communisme. En effet, les tours immenses (Sony Center et sa gigantesque coupole) pointent vers le ciel en l’honneur de la gloire du capitalisme. Les immeubles, tous semblables, qu’il y avait en RDA sous le régime communiste ont disparu ; englobés par les hauts immeubles en verre.


        Sur Unter den Linden, la grande avenue du centre de Berlin, la différence depuis les vingt dernières années est saisissante.  Le mur gris et sale, les barbelés rouillés, les immeubles sombres, les hôtels vides ont laissé leur place à une vue imprenable  jusqu’à la colonne de la Victoire, aux façades ravalées, aux vitrines des grands magasins qui attirent les touristes comme dans toutes les grandes villes d’Europe. Starbucks et MacDonald sont à Berlin aussi très présents, tout comme les boutiques Dior, Chanel, Prada, Escada, etc.… Ces boutiques de grandes marques, inexistantes en RDA se sont peu à peu imposées après la réunification dans l’Est de la capitale.


           Berlin emploie son énergie à gommer les symboles de la puissance politique. Le nouveau ministère des affaires étrangères ressemble plus à une galerie marchande qu’à un ministère. Tout le monde peut y flâner ou y boire un café. De même, les bureaux et les logements des députés ont l’allure d’un Grand hôtel ; chose qui aurait été impensable sous le régime communiste. La culture occidentale a donc bel et bien dominé la reconstruction de la capitale au détriment de l’architecture du bloc soviétique.



                    La DEFA (Deutsche Film AG) était, lors de la séparation, le studio d’état du bloc soviétique en Allemagne.  Sur cette période, la DEFA a produit environ 700 long-métrage, 750 films d'animation et 2250 courts-métrages. Elle a aussi réalisé le doublage d'environ 8000 films.
                       Dès 1945, les soviétiques ont une réelle volonté de relancer la production cinématographique en Allemagne de l’est notamment comme support de propagande. La DEFA est fondée en 1946 et reprend les ateliers de l’Universum Film AG dans le quartier de Babelsberg à Potsdam. En 1950, peu après la fondation de la DDR (république démocratique allemande), l'entreprise devient propriété de l'État est-allemand puis est réorganisée en plusieurs « Volkseigener betrieb » : le cinéma se libéralise.




                    Ce cinéma de propagande est-Allemand, glorifiait les prolétaires dans la lutte des classes : Les soviétiques inventent une réalité sociale, à savoir le bonheur des allemands de l’est. A la chute du mur, le cinéma est d’abord un moyen de parler d’événements historiques qui n’ont toujours pas donner lieu a des projections : le régime nazie, la divisions de l’Allemagne etc. puis,  le cinéma devient un moyen d’exprimer une certaine nostalgie de l’Allemagne de l’est grâce à des films comme Good Bye, Lénine ! (2003) de Wolfgang Becker, Sonnenallee de Leander Haussman (1999). Ces films ont connus un succès international : Le cinéma s’exporte.
               L’Allemagne retrouve donc une unité culturelle libérale.

mardi 21 décembre 2010

c) Les jeunes s’ouvrent sur le monde

 
Au temps de « Berlin séparé », les jeunes est-allemands étaient victimes d’une propagande visant à empêcher toute création qui sortirait de la norme imposée.




A la chute du mur, ces derniers découvrent d’autres formes d’art, d’autres loisirs grâce au capitalisme.

 La musique évolue : à partir de 1990 de nombreux groupes de métal font leur apparition sur le devant de la scène avec notamment Rammstein, Helloween, Gamma Ray et Blind Guardian qui acquièrent une forte popularité en Europe.
Ces groupes sont aujourd’hui présentés comme les « enfants de la chute du mur ». La scène allemande est maintenant la plus variée et la plus populaire d’Europe.


Salle réservée aux amateurs de musique "techno" dans les années 90.

"Wind of change", l'hymne de la chute du Mur.


 


dimanche 19 décembre 2010

a) "Ostalgie": les difficultés issues de la réunification vont donner naissance à une nostalgie qui se fait sentir chez un certains nombres d’allemands de l’est. Retour quelques années en arrière, notamment sur les produits phares de l’ex-RDA.


              Après l’euphorie de la chute du mur de Berlin, une déception survint très rapidement. Des millions d’Allemands de l’Est « émigraient » chaque soir en regardant  les chaînes de télévisions Ouest-allemandes. L’ouest représentait pour eux la vie facile, les belles voitures, les vacances à Hawaï. Aujourd’hui, alors que la réalité est bien différente, certains accusent la démocratie de les avoir trompés. Bien que l’Est se soit aligné sur l’Ouest, un malaise persiste chez un certain nombre d’Allemands ; le phénomène d’Ostalgie apparaît à la fin des années 1990. Le terme « Ostalgie » est formé du mot –Ost, l’est et de la –nostalgie. Il s’agit d’un sentiment de nostalgie à l’égard des Allemands de l’Est. Une partie de la population de l’Est, difficile à chiffrer, a ressenti un mal du pays tel qu’il était avant. En effet, 12 %  des allemands de l’est et un quart des gens de l’Ouest souhaiteraient un retour à l’Allemagne séparée. Un sondage de juin 2009 annonce que 57% des Allemands de l’Est pensent que la RDA avait plus de bons que de mauvais côtés et 8% estiment même qu’ on vivait beaucoup mieux en RDA  qu’aujourd’hui.

               Malgré la disette permanente et la surveillance de la Stasi, c’est l’amour du passé, de la jeunesse et du bon temps ainsi que la volonté de retrouver des petits plaisirs d’antan qui se fait sentir plutôt qu’un retour au communisme. Quelques jours à peine après la chute du mur de Berlin, il devient impossible de retrouver dans des supermarchés certains produits de RDA, comme les fameux « Spreewälder Gurken » ou le « Mocca Fix Gold », produits phares de RDA.


Impossible, aussi, de retrouver les crème de beauté Florena, pourtant, « c’est un moyen pour nous de retrouver notre partie, une façon de retourner à la maison », dit Daniela Halpik qui avait 12 ans quand le mur est tombé. Elle se souvient que « tout n’était pas si mal à l’Est. On pouvait aussi avoir une vie confortable. J’ai eu une enfance heureuse. J’aimais les pionniers et les activités extrascolaires qu’on nous proposait ».  Un certain  nombre de jeunes assimilent cette vision positive d’une RDA qui peut être jugée d’ « idéalisée », véhiculée par leurs parents et enseignants. « Bien sûr la qualité n’était pas au rendez-vous, mais on pouvait remplacer la courroie du ventilateur par une paire de bas, et ça tenait encore 100 kilomètres » assure une personne citée par une étude parue dans le magazine culte de l’Est Superillu.

              Les rapports entre Allemands de l’Est et Allemands de l’Ouest ne furent pas toujours évidents. Les allemands de l’Ouest se révélèrent être arrogants et égoïstes. Les Allemands de l’Est les qualifiaient de « passiv, pazifistisch, pessimistisch, paranoid ».
Un bon nombre de plaisanteries à l’égard des Allemands de l’Est survinrent :
 - « quelle est la différence entre les Wessis et les Russes ?
Réponse : on a réussi à se débarrasser des Russes ».                              
Ou encore : - « L’Ossi dit au Wessi : « nous sommes un peuple ! » Le Wessi répond : « oui, nous aussi ».
Ou encore : - « le renard est rusé. Il fait mine d’être bête. Pour le Wessi, c’est le contraire ».
 Les Allemands de l’est essayent de dépasser le sentiment de prédominance des Allemands de l’ouest avec ces blagues.

                Les Allemands de l’Ouest ont réalisé leur vœu le plus cher, ils ont fait disparaître le cadavre de la RDA et leur pays est réunifié. Ceux-ci, cependant, regrettent le temps ou Bonn était une sorte d’Eden, comparée à Berlin en 2009. Il n’y avait aucunes difficultés intérieures ni responsabilités internationales.
De plus, il n’y avait en RDA que 1,5 % des femmes au foyer en 1989 contre 15,8 % en RFA et seul 0,8 % de la population avait connu le chômage en RDA. Les allemands de l’est – particulièrement les femmes et les jeunes - sont donc traumatisés par le ratio de chômage de l’économie capitaliste ainsi que par une  tendance à l’insatisfaction et au malheur hérité de la RDA. En RDA, il y avait une économie centralisée et la plupart des Allemands de l’Est ont gardé l’idée que tout doit être égal partout. Les hommes de l’est sont cependant aussi victimes de la réunification ; en effet, près de 15% d’eux quittent l’école sans diplôme. Une mentalité revendicatrice ainsi qu’une tendance à l’insatisfaction et au malheur hérité de la RDA ont eux aussi participé au développement de l’Ostalgie. 
Une étude menée en 1991 révèle que deux Allemands de l’Ouest sur trois estiment avoir « leur part ou plus » de bonheur et de prospérité, alors que trois allemands de l’Est sur quatre pensent avoir « moins que leur part ». C’est donc en partie à cause du chômage qu’apparaît le phénomène d’Ostalgie.

             Il y eut aussi la monnaie. Peu de temps après la réunification, en 1991, l’ex-RFA fit un énorme cadeau à l’ex-RDA en échangeant les marks socialistes à parité des marks fédéraux ce qui permit le développement de l’Est. Cela ne fut pas sans conséquence pour l’Ouest ! Selon la loi de 1993, l’impôt « spécial réunification » court jusqu’en 2019. Il devrait coûter entre 1200 et 1500 millions d’euros aux Allemands. Mais ce qui fut encore plus lourd pour l’économie allemande, fut le passage à l’euro. Le mot « Teuro » fut élu mot de l’année 2002, contractant les mots  « euro » et « teuer », cher.

            L’Ostalgie est à l’origine du  Linkspartei, le nouveau parti de gauche ; notamment avec les nouveaux Länder qui penchent nettement à gauche en faveur du parti die Linke, alors que les anciens Länder, eux, sont nettement orientés vers la droite (CDU-CSU et FPD). L’Ostalgie est à l’origine de slogans tel «Le Mur n’est pas tombé dans les têtes». Une différence flagrante reste présente entre l’Ouest et l’Est. L’Ouest n’a pas répondu aux attentes de l’Est, il a même corrompu ce que le régime socialiste présentait de bon, un certain sens de la solidarité. Cela provoque une sorte de « Honeckerisme », en référence à Herich Honecker, dirigeant de RDA. Christophe Tanner, 36  ans, organisateur de concerts de rock et critique d’art dira : « Nous vivions dans un monde ou l’argent ne comptait pas et ou régnait une chaleur et une affection inimaginable, qui ont presque disparus ». Cette chaleur et cette joie de vivre furent regrettées par beaucoup de personnes, malgré les préjugés que nous avons sur un certain emprisonnement des allemands de l’Est.

                Elle engendre enfin une sorte de fascination ironique chez les jeunes consommateurs allemands de l’Ouest qui ont trouvé une brocante morale tout à fait dépaysante.  Dans le quartier bobo berlinois, les « antiquités » installées sous les tilleuls ont tout juste quarante ans, pas plus ! Elles datent des années 1970 et sont certifiées DDR (Deutsche Demokratische Republik). Il faut compter 40 euros pour une vieille armoire de cuisine en fornica orange estampillée RDA. La nostalgie est-allemande alimente nouveau marché d’art. L’engouement des touristes ou même des Allemands de l’Ouest pour les vestiges de l’Allemagne de l’Est ne cesse de croître.

A Berlin, le musée de l’Ostalgie est toujours plein, les gens y voient des jeans d’époque, des grilles pain authentiques, des vieux téléphones.  Des Trabis safari sont même proposées pour faire le tour de Berlin « comme avant ». Un hôtel offrant un retour en Ostalgie est même installé dans un ancien « Plattenbau », un immeuble en béton datant de l’époque stalinienne. Le confort y est moindre : chambres dortoirs avec salle de bain collective sur le pallier. Le tout est décoré à la façon RDA : tapisseries à motif, lampes en plastic blanc, tables en Fornica, portraits d’Honecker au-dessus des lits. Meubles et papier peint ont été rachetés chez des antiquaires ou dans des anciennes familles de l’Est

             Ainsi, les allemands de l’est ont l’impression d’avoir perdu leurs nombreux espoirs qui les animaient lorsque le mur était présent. Le pays des merveilles a disparu, il s’est transformé en réalité bien différemment de ce qu’ils espéraientL’espoir enfantin les a quittés. Avec la destruction des symboles de l’Allemagne de l’est, tels le palais de la république ou le Parlement qui ont été détruits en 2006, les Allemands refusent de voir le pays de leur jeunesse disparaître.  D’où le phénomène d’Ostalgie. Mais celle-ci risque de provoquer en retour une mauvaise humeur de quelques Allemands de l’Ouest qui doivent payer pour de « boulets » pareils. Un nouveau mouvement nostalgique commence à naître à l’Ouest : « notre chère RFA » est devenu la devise préférée de ceux qui regrettent leur pays prospère, sans responsabilité internationale et surtout sans impôts à payer pour reconstruire l’Est et aider ces « paresseux d’Ossis ». Celle-ci résulte de la stagnation du niveau de vie qui touche la plupart des Allemands de l’Ouest depuis vingt ans. 


Feux de l'ex-RDA, toujours présents à Berlin.